samedi 14 décembre 2013

Prisonnier


Muet, immobile, à genoux sur la glaise froide,
L'homme – silhouette, ombre, cadavre roide -
Pense. Les yeux levés vers le ciel absent
Il prie, jure, anathème, qu'importe ? Il songe.
Regrets durs, lancinants, mordants, remords qui rongent.
Crimes, folies, délires, délits indécents ?

Dix jours, dix mois, dix ans – l'oiseau dans la cage
Ne compte pas. Rêve, vol ou carnage, il rage.

Tout autour de lui, silencieux et volubiles
Volent, dansent, les mots des ci-devant damnés
Écrits dans le sang, dans les larmes, dans la bile
Reclus, fers aux idées comme aux pieds, condamnés
À être perdus ! Ni foi ni rêves ; désespoir !
L'aumônier. Comme si en Enfer on pouvait croire !

Hérétiques, tous ceux-là qui frappent leurs crânes
Contre les murs, vacarme à lever les mânes !

Nul dieu, nul sauveur dans les murs d'une prison.
Cris des meurtriers, terrible et lugubre son !
Il y a-t-il des Walkyries pour les guerriers
Morts dans la tourbe des cachots, silences charriés
De crépuscule en crépuscule par les vents d'Est
Jusqu'à ce que – un jour viendra ! - hurlent leurs restes ?

Mais vois ! Il s'est levé, chancelant dans sa geôle
Ses mains se crispent sur les barreaux de la tôle.

Regarde-le, passant ! Cet homme-là ne crie
Ni pour de l'or, ni pour du pain, non, il s'écrie,
Il supplie, requête incessamment rejetée,
Pour un souffle de lumière, d'éternité
Un ciel, Dieu, une poignée de fraternité
Un reste d'air, une gorgée de liberté !

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