Les rires et les cris des jeunes gens viennent rebondir en nombres
sur les murs, avant de me transpercer de part en part, me laissant sans
défense. Au fur et à mesure que j'avance calmement, des centaines de
corps me frôlent, me bousculent. Chaque contact déclenche en moi une
réaction de dégout et de résignation. Mon envie de fuir, de me
transformer, et de m'élever vers les cimes d'acier a disparue. Avec elle
s'en est allé mon inconscience, alors est arrivée la peur.
La
peur est une deuxième ombre, elle est mouvante car elle l'incarnation
de votre futur qui se matérialise un peu plus à chaque inspiration. Je
continue à marcher, à respirer, à regarder droit devant moi. Autour de
moi, les gens semblent avoir un but, tous autant qu'ils sont. Ils
semblent espérer quelque chose, un futur meilleur, ils semblent viser
quelque chose. Moi je n'ai pas de chance je suis lassé de tout. J'ai
essayé d'explorer le monde, tout ce que j'en ai retenu c'est le côté
dérisoire du monde et de la vie. Au fur et à mesure que vous explorez,
l'art, la spiritualité, les sciences, les techniques, les philosophies,
la métaphysique, vous comprenez. Vous comprenez que tout ca n'est pas
très important car vous savez désormais que vous n'êtes qu'un petit
humain et que les gens qui pensent réaliser de grandes choses ne sont
qu'une petite perturbation cosmique de plus. Je rêve très souvent, de
m'envoler et d'être un esprit intemporel, sans dimension, je connaitrais
alors l'extase d'être entité pure. Je m'éloigne de l'humanité peu à
peu, cela m'inquiète. Tout d'abord, les gens vous dégoutent, vous les
évitez, vous les conspuez, vous les ignorez. Puis certaines de leurs
productions vous dégoutent.
L'attrait du voyage ! Quel esprit
éveillé aux choses du monde n'a pas ressenti cet appel vers des terres
toujours plus lointaines et exotiques. Des temples thaïlandais, des
sources chaudes islandaises, des villes brillantes comme milles
diamants. Pour enfin fuir les goudrons mouvants de nos villes
occidentales, nous regardons par-delà l'horizon et espérons prendre le
prochain train, suivre le prochain trimardeur vers l'infini à portée de
main, vers les longues descriptions, vers la rédemption de nos âmes
rongées par l'angoisse et la tristesse. Nous appelons à combler le vide
de nos identités par le mouvement. Bouge, bouge, bouge avant de ne plus
être car bientôt il sera trop tard, et vous ne penserez plus.
Bouge
et va voir cet homme, cette femme qui vit loin de toi sans savoir, sans
voir et qui vit pourtant. Va le voir lui que personne n'écoute alors
que ses ancêtres lui ont cédé la sagesse. Va le voir celui la qui pleure
la nuit et qui erre dans les rues, va le voir prend le par le bras et
emmène le avec toi dans tes voyages. Va les voir ces paysages qui ne
s'occupent pas de toi, va les voir ces montagnes et ces désert qui ont
résisté à l'homme et qui le tue encore.
Fuis toi et fuis ce qui
t'as fais, deviens une autre personne. Regarde le hasard droit dans les
yeux et montre lui que tu ne te laisseras pas faire, que tu es un fils
des étoiles et que tu deviendra qui tu dois être.
J'ai dis plus
haut que les gens et leurs productions commençaient à me dégouter, j'ai
omis de préciser que je me dégoutais aussi, que je ne pouvais pas relire
ce texte après l'avoir écris sans un petit pincement au cœur, d'être si
pathétique. Je ne sens pas les mots, je ne ressens aucune magie,
contrairement à ce que décrivent tout les écrivains une fois dans leur
vie. Oh non, tout ce que je ressens à ce moment précis, c'est un
impératif. Je me dois d'écrire, je me force à écrire, parce que,
peut-être, je pourrais me lire un jour sans vomir.
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